Attendre la vie et connaitre la mort à la place est beaucoup plus répandu que l’on ne le pense. Le deuil périnatal, c’est-à-dire lorsqu’un bébé meurt entre 26 semaines de grossesse et six jours de vie, concerne ainsi plus de 7000 couples par an en France. Les fausses couches, quant à elles, sont encore plus répandues, puisqu’elles représenteraient environ un quart de toutes les grossesses. Même si ces situations sont fréquentes, on accorde souvent peu d’attention à la souffrance des parents, pourtant bien réelle. La perte d’un fœtus, et a fortiori celle d’un bébé, est souvent vécue comme la perte d’un enfant, puisqu’elle arrive suite à un désir d’enfant et à une grossesse bien réelle.
Des rêves et des projets brisés
Même si les raisons des morts périnatales sont parfois facilement identifiables, malformations, maladies, prématurité, dans bien des cas, elles restent inexplicables, et ce malgré les avancées de la médecine. C’est encore plus vrai des fausses couches : l’absence d’informations entraine inévitablement une incompréhension et une culpabilité. Les mères pensent que c’est de leur faute et qu’elles n’ont pas su reconnaitre que le bébé, ou le fœtus, était en souffrance. Mais le plus dur pour les parents est de renoncer aux projets qu’ils avaient échafaudés avec cet enfant qui faisait déjà partir de leur avenir, et ce quelle que soit la taille du fœtus.
L’importance de rendre réel un moment irréel
Mettre un monde un enfant mort-né est un choc immense, auquel les parents ne sont jamais assez préparés. A peine le bébé mis au monde, il faut en effet lui dire au revoir : une situation irréelle qu’il faut absolument rendre la plus réelle possible pour pouvoir entamer le processus de deuil. Les parents devraient ainsi pouvoir voir, toucher et porter leur enfant et lui donner un prénom, seulement s’ils le désirent bien évidemment. Certains insistent pour faire sa toilette mortuaire, pour l’habiller, et même parfois prendre une photo avec lui. Si la maman a fait une fausse-couche, on peut lui montrer une photographie du fœtus, s’il est déjà formé. Ces derniers moments avant le départ définitif de l’enfant sont essentiels, et peuvent aider à mieux vivre le deuil.
Un deuil très particulier
Le deuil périnatal et les fausses-couches ne sont pas des deuils comme les autres. L’intensité du drame vécu par les parents est ainsi sous-estimée par leurs proches ; on pense souvent, à tort, que parce que l’existence de l’enfant a été très courte, le deuil le sera également, comme si la douleur était proportionnelle à la durée de la vie. Dans le cas des fausses-couches, quant la grossesse n’avait pas encore été annoncée à l’entourage, le deuil passe complètement inaperçu. La mort périnatale est toujours un sujet très compliqué à aborder de toute façon ; on n’ose pas en parler, et expliquer pourquoi un moment de bonheur s’est transformé en drame. Le retour à la maison est un moment particulièrement difficile ; tout était prêt pour le bébé, et son absence se fait plus pesante. Certains ressentent le besoin d’effacer les traces de son existence, tandis que d’autres les conservent et se réfugient dans ce qui aurait dû être sa chambre, qui devient la preuve de la vie de cet être que l’on a à peine ou pas du tout connu. Comme toujours dans le processus de deuil, il n’y a pas une façon unique de réagir, et chacun emprunte un chemin différent.
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