On a longtemps pensé que les hommes faisaient leur deuil plus rapidement que les femmes, et que les veufs, notamment, étaient plus facilement capables de tourner la page que les veuves. Plusieurs études menées ces dernières années montrent que la réalité est plus complexe : les hommes vivent bien souvent le deuil différemment des femmes, c’est vrai, mais cela ne signifie pas qu’ils souffrent moins ou moins longtemps.
Vivre le décès d’un conjoint
Une étude menée en 2001 aux Pays-Bas et publiée dans The Review of General Psychology a montré que les veufs sont plus susceptibles de contracter des maladies physiques et mentales ou de se suicider que les veuves. En effet, hommes et femmes ressentent différemment la perte d’un conjoint. Les femmes ont généralement le sentiment de se retrouver complètement seules au monde. Mais pour les hommes, c’est encore pire : ils ont l’impression qu’un de leur membre a été arraché, qu’ils ont perdu une partie d’eux-mêmes. Ils se sentent incomplets, incapables de fonctionner seuls, et ce parce qu’aujourd’hui encore, les hommes comptent beaucoup sur les femmes pour l’organisation de la vie quotidienne.
La perte d’un enfant
La disparition d’un enfant met souvent en lumière la différence entre le deuil des hommes et celui des femmes. Il n’est pas rare que des femmes trouvent leurs maris insensibles, car ils ne ressentent pas le même besoin qu’elles de partager leur souffrance. Lorsqu’ils craquent, c’est souvent seuls, alors que les mères endeuillées ont plus facilement envie de pleurer à chaudes larmes dans les bras de leur maris. Elles en déduisent parfois, et à tort, que leurs compagnons aimaient moins l’enfant qu’elles, ce qui peut créer des incompréhensions et des tensions dans les couples. Le même genre de situation émerge parfois entre un père et sa fille, lorsque la mère décède.
Comment expliquer cette différence ?
Notre éducation, nos expériences et les attentes de la société façonnent la façon dont nous vivons le deuil. On incite ainsi généralement les garçons, dès le plus jeune âge, à ne pas pleurer et à ne pas exprimer leurs émotions. Par conséquent, les hommes sont souvent plus tournés vers l’action et le travail que les femmes ; ils ont un rôle de protecteur, qu’ils doivent conserver en toute situation, même dans les moments les plus douloureux de leur vie. Lorsqu’ils perdent un être cher, parent, enfant ou partenaire, on a donc l’impression qu’ils se tournent plus vite vers l’avenir que les femmes, qui vivent davantage leur deuil dans le présent. Toutefois, en gardant leurs émotions sous contrôle, de nombreux hommes ne font qu’empirer la situation.
Respecter le deuil de l’autre, quel quoi soit la forme qu’il prenne
Il y a de multiples façons de vivre le deuil, que l’on soit un homme ou une femme. Il est donc essentiel de respecter les personnes endeuillées et de les laisser libres d’exprimer ou pas leurs sentiments. De la même façon qu’il ne faut jamais dire à quelqu’un qui a perdu son conjoint qu’il faut tourner la page et aller de l’avant, il ne faut pas penser qu’une personne qui retrouve une compagne ou un compagnon après quelques mois de veuvage ne souffre pas et a complètement fait son deuil : la réalité est toujours plus complexe que les apparences.
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